Blog dedicado a la genealogía de Gardel, meticulosamente documentada por investigadores de Francia, especialmente M. Georges Galopa.

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Charles et Louis Carichou

(Histoire de la Famille de Berthe Gardes)

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n janvier 1936, quelques mois après la mort accidentelle de son fils Carlos GARDEL, Berthe GARDES se livra à quelques confidences à un journaliste de la revue « La canción moderna » 

Elle déclara :  " Mes parents étaient d'humbles gens, je ne me souviens pas bien de mon père. Ma mère était mariée en secondes noces et nous disions " oncle " à notre beau père qui était très bon .... ma mère était modiste et avait de bonnes clientes. Son esprit était très vagabond et son ambition la poussa à quitter la France.... Je n'ai jamais su comprendre les pensées de ma mère et pour cela peut être nous nous sentions distantes. Mes souvenirs de cette époque ne sont pas très agréables... je ne pouvais pas vivre face à l'incompréhension de ma mère et je décidais de quitter la France ".

 
Cet " oncle " s'appelait Louis CARICHOU, et il fut le compagnon d'Hélène CAMARÈS, la mère de Berthe GARDES pendant de longues années avant de devenir son époux.

Les documents retrouvés dans les archives françaises laissent apparaître que la séparation de Berthe GARDES avec sa famille s'est produite au début de l'année 1890. Une autre personne, par son influence et sa position sociale, a joué un rôle important dans cet événement. Il s'agit de Charles CARICHOU, le frère aîné de Louis CARICHOU.

Cette étude retrace l'implication de Louis et Charles CARICHOU dans le destin de la famille française de Carlos GARDEL. Elle a pour point de départ le mariage de leur père Dominique Étienne CARICHOU à Toulouse.

1- DOMINIQUE ÉTIENNE CARICHOU, DE TOULOUSE A SAUMUR.

Le 21 octobre 1842, Dominique Étienne CARICHOU, bijoutier de profession, épouse Louise Jeanne JOURDAN. De cette union naît le 29 octobre 1843 en leur domicile toulousain, 65 rue du Taur, leur premier enfant : Hippolyte Charles Bernard Antonin CARICHOU.


                                           Fig 1 :  Acte de naissance d’Hippolyte Charles Bernard Antonin CARICHOU (© Archives Municipales de Toulouse)



Des quatre prénoms donnés à l'enfant, Charles sera celui qui sera employé dans la vie courante. Au bas de l'acte de naissance et en sa qualité de témoin, Louis PEYRONNET a apposé sa signature. Cette personne accompagnera la famille CARICHOU dans tous les événements importants.

Quelques années plus tard, la famille CARICHOU déménage à Saumur, une ville située au bord de la Loire, à environ 500 kilomètres au nord de Toulouse. Saumur, qui compte à cette époque 12500 habitants[1], est réputée pour son vignoble et ses entreprises de joaillerie et d'art religieux[2]. Dominique Étienne CARICHOU va y installer un atelier de fabrication de médailles religieuses. 



Fig 2 : Position de Saumur par rapport à Toulouse sur la carte de France.

   

La famille de Dominique CARICHOU apparaît dans le recensement de Saumur de 1846. Sur le document suivant tiré d'un microfilm des Archives de Saumur, on peut voir, malgré la mauvaise qualité de l'image, que cette famille habite au N°5 de la rue de l'Abreuvoir en compagnie de 3 ouvriers bijoutiers. Parmi ces ouvriers figure Louis PEYRONNET, 29 ans, le témoin qui a signé l'acte de naissance de Charles CARICHOU.


Fig 3 : Recensement de Saumur de 1846, rue de l 'Abreuvoir. (© Archives de Saumur)


Le logement situé au numéro 5 de la rue de l'Abreuvoir à Saumur est occupé par 7 personnes :

12 CARICHOU DominiqueBijoutier29 ans
13 JOURDAN LouiseSa femme24 ans
14 CARICHOU CharlesLeur fils3 ans
15 Veuve JOURDAN Antoinette LABARTÉLeur mère58 ans
16 PEYRONNET Louisouvrier Bijoutier29 ans
17 CAGNÉLouisidem20 ans
18 BRANDT François idem33 ans



Le 7 juillet 1847 naît à cette même adresse Louis Alphonse Julien CARICHOU. On retrouve à nouveau au bas de son acte de naissance la signature de Louis PEYRONNET.

Fig 4 : Acte de naissance de Louis Alphonse Julien CARICHOU (©Archives Départementales du Maine et Loire)



            

Le synoptique suivant montre le développement de la famille CARICHOU :







L'ÉCHO SAUMUROIS :

Les archives de Saumur possèdent les éditions du journal " L'Écho saumurois " rapportant les faits de Saumur et de ses environs de 1853 à 1939. La consultation de ce journal nous a fourni des informations de premier ordre sur la famille CARICHOU.

Fig 5 : Manchette de  " L'Écho saumurois" -  (©Archives de Saumur).




Dominique CARICHOU et sa famille vont quitter la rue de l'Abreuvoir (aujourd'hui rue Jules Ferry) pour venir habiter au centre-ville de Saumur.

Fig 6 : Plan de Saumur de 1858 mentionnant les lieux où a habité Dominique CARICHOU. (source : BNF - gallica)


Sur cet ancien plan de Saumur, la rue de l'Abreuvoir est située sur une île reliée à la ville par le pont CESSART qui enjambe la Loire. En 1856, la famille CARICHOU habite rue de la Tonnelle en centre-ville. L'année suivante, elle réside quai de Limoges où Dominique CARICHOU et son épouse sont propriétaires de leur maison. Ils achètent une parcelle de terrain de 400 mètres carrés qui jouxte leur propriété[3] pour édifier leur nouvel atelier de fabrication de médailles.
L'Écho saumurois du 10 septembre 1861 rapporte que cet atelier été victime d'un incendie qui a ravagé toute la toiture.

Fig 7: "L'Écho saumurois" du 10 septembre 1861: incendie de l'atelier CARICHOU. (©Archives de Saumur)











Extrait de l'article : "... la population se portait vers l'établissement de M. CARICHOU, bijoutier, levée (quai) de Limoges. Tout à coup les flammes s'étaient fait jour à travers la toiture et, favorisées par la sécheresse et le vent qui soufflait, le corps de bâtiment des ateliers s'était trouvé en feu en un instant sur toute sa longueur....... la toiture a été entièrement détruite...."




            











Charles et Louis CARICHOU font leurs études primaires au pensionnat Coulon à Saumur. L'Écho saumurois " rapporte le 14 août 1858, que Charles CARICHOU (15 ans) est primé en Géographie, Histoire, Exécution graphique des plans, Dessin, et en musique vocale. Il est également récompensé l'année suivante.

 Fig 8: Distribution des prix du pensionnat Coulon (en réalité: "pensionnat de Nantilly") "L’Écho saumurois " du 14 août 1858. (© Archives de Saumur)

  
                                        

En 1860, son frère cadet, Louis CARICHOU (13 ans) obtient, lui aussi, d'excellents résultats. Il reçoit le prix d'excellence de sa classe et est cité en Analyse Grammaticale, Histoire, Géographie et Calcul comme l'indique l'extrait de journal suivant :


Fig 9 : Distribution des prix du pensionnat de Nantilly - " L'Écho saumurois " du 9 août 1860.(© Archives de Saumur)























2- MARIAGE et  POSITION SOCIALE de CHARLES CARICHOU

Le mariage de Charles CARICHOU est un grand événement pour la ville de Saumur en raison de l'importance de la famille de l'épouse. Son père, Angelo BOLOGNESI est un émigré italien qui a fui en 1845 la répression autrichienne en Romagne (qui faisait partie à l'époque des États Pontificaux) pour se réfugier en France. Angelo BOLOGNESI s'associe à Jean Marie COMBIER, qui dirige une importante distillerie, avant de créer en 1858 sa propre entreprise. Il devient un industriel riche et réputé.[4]  Sur le site internet https://saumur-jadis.pagesperso-orange.fr/recit/ch34/r34d1liq.htm, on trouve une étiquette de bouteille de " Liqueur hygiénique de dessert " Angelo BOLOGNESI avec la liste des médailles obtenues dans plusieurs expositions internationales.

Fig 10: Acte de mariage de Charles CARICHOU avec Thérèse BOLOGNESI (1ère partie) (© Archives Départamentales du Maine et Loire)


La première partie de l'acte est rédigée ainsi :

"Aujourd'hui, 29 avril 1867, à neuf heures du soir, Par devant nous, Jean CHEDEAU adjoint au Maire de la ville de Saumur (Maine et Loire), remplissant par délégation les fonctions d'officier de l'État-Civil,  Procédant publiquement, Ont comparu à la mairie Mr Hippolyte Charles Bernard Antonin CARICHOU, négociant né à Toulouse (Haute Garonne) le 29 octobre 1843, domicilié à Saumur avec ses père et mère. fils mineur quand au mariage de Dominique Étienne CARICHOU, bijoutier, et de Louise Jeanne JOURDAN, sans profession, son épouse, tous deux ici présents et consentants[5]........ D'une part..........
Et Mlle Anne Marie Thérèse BOLOGNESI, sans profession, née à Saumur le 18 mars 1849, fille mineure d'Ange Bernardin BOLOGNESI, liquoriste, et d' Anne DUDOUET son épouse, sans profession, demeurant ensemble à Saumur, tous deux ici présents et consentants......

Fig 11: Acte de mariage de Charles CARICHOU avec Thérèse BOLOGNESI (2ème partie) (© Archives Départamentales du Maine et Loire)



L'examen attentif des signatures de l'acte de mariage apporte des informations intéressantes.

On trouve en haut les signatures des mariés : Ch. CARICHOU fils et Thérésa BOLOGNESI, suivies de Louise CARICHOU, la mère du marié (née JOURDAN), et des parents de la mariée : Angelo BOLOGNESI, et Angela BOLOGNESI DUDOUET.
La troisième ligne des signatures commence par celle du premier témoin en la personne de Noël-Henry MAYAUD, un grand industriel et un élu politique de Saumur cité dans l'acte comme " manufacturier et membre du Conseil Général du Maine et Loire ". Un article sur les bijoutiers de Saumur révèle qu'il fabrique des objets religieux et fait appel "à des ateliers spécialisés comme celui de CARICHOU[6] ". Viennent ensuite les signatures du père du marié : Dominique CARICHOU, puis celle de Louis PEYRONNET, bijoutier, domicilié à Toulouse (Haute Garonne ), âgé de 51 ans, toujours présent auprès de la famille CARICHOU. Enfin, sur la dernière ligne figure la signature de Louis CARICHOU, frère cadet du marié, et celles des deux autres témoins : Gustave CONTDÉRANT professeur de mathématiques en retraite, et Armand TAILLEBOIS, propriétaire.

Charles CARICHOU est négociant en vins. En 1869[7], il s'associe à Auguste CHRISTIANI, propriétaire d'une cave de stockage et de vieillissement de bouteilles de vins mousseux creusée dans le sous sol de la ville de Saumur. Cette association dure peu, et la cave est rachetée l'année suivante par les beaux parents de Charles CARICHOU[8] qui agrandissent ainsi leurs activités au profit de leur fille unique et de son époux. C'est ainsi qu'est fondée la maison C.CARICHOU-BOLOGNESI qui commercialise des vins mousseux " façon champagne " comme l'indique cette annonce parue dans " Le Phare de la Loire " du 24 janvier 1874.

Fig 12: Petite Annonce de la Maison C.CARICHOU-BOLOGNESI
extraite du journal de Nantes "Le Phare de la Loire" du 24 janvier 1874.
(©Archives Départamentales de Loire Atlantique)

Le 31 mai 1868 naît Georges Étienne Angélo CARICHOU, premier enfant de Charles CARICHOU et de son épouse. Il sera suivi le 4 juillet 1875 par un second fils prénommé Louis Étienne Angélo. Sur les actes de naissance, on remarque que la signature du père a évolué. Si pour l’aîné, il a signé  Ch. CARICHOU, pour le cadet, il signe à présent CARICHOU BOLOGNESI. Ainsi associée au nom d'une riche famille industrielle de Saumur, sa signature devient plus prestigieuse.


Fig 13: Signatures de Charles CARICHOU sur les actes de naissance de ses 2 fils. (© Archives Départamentales du Maine et Loire)



            
Charles CARICHOU prendra de plus en plus d'importance dans les affaires à tel point qu'en 1880, après la mort de son beau père, il dirigera la distillerie familiale qui deviendra la DISTILLERIE Veuve Angelo BOLOGNESI & C.CARICHOU, comme le montre cette publicité extraite du catalogue de la prestigieuse Exposition Universelle de Paris de 1889 (pour laquelle fut inaugurée la Tour Eiffel). 


Fig 14: Publiité extraite du Catalogue de l'Exposition Universelle de Paris de 1889 (Source: BNF - gallica)




3- LOUIS CARICHOU – LE COMPAGNON D'HÉLÈNE CAMARÉS

A/   Naissance de Blanche Hélène CARICHOU

Le premier document d'archives concernant Louis CARICHOU dont nous disposons après ses années passées à Saumur est l'acte de naissance de sa fille Blanche Hélène, née à Toulouse le 26 juin 1873.

Fig 15: Acte de naissance de Blanche Hélène CARICHOU (© Archives Municipales de Toulouse)






















L'acte est rédigé ainsi : "  Du vingt sixième jour du mois de juin 1873 à trois heures du soir. Naissance de Blanche Hélène CARICHOU, née le jour d'hui à dix heures du matin, rue Sainte Germaine,24, fille naturelle de Louis Alphonse Julien CARICHOU, Bijoutier, âgé de 26 ans né à Saumur (Maine et Loire) et de Mère Inconnue, sur la déclaration faite à nous par CARICHOU, père..... "
En application du Code Civil du 21 avril 1804, (appelé aussi Code Napoléon), Blanche Hélène CARICHOU a été déclarée  fille naturelle, ce qui signifie qu'elle est née de parents non mariés. L'identité de la mère n'a pas été dévoilée, mais plusieurs indices laissent fortement penser qu'il s'agit d'Hélène CAMARÈS, avec qui Louis CARICHOU partira pour le Venezuela en janvier 1875.
Par décision du Tribunal de Grande Instance de Toulouse en date du 2 décembre 1867, Hélène CAMARÈS vit séparée de son mari Vital GARDÈS, mais elle n'est pas divorcée, car sous le règne de l'Empereur NAPOLÉON III, le divorce n'est plus autorisé. Si le nom de la mère avait été mentionné sur l'acte de naissance, cela aurait constitué une preuve d'adultère, et le Code Civil en vigueur prévoyait pour la femme coupable de ce délit une peine pouvant aller de trois mois jusqu'à deux ans de prison. (chapitre 4, article 298 du Code Civil de 1804).

Voici un extrait de la décision du Tribunal de Grande Instance de Toulouse ordonnant la séparation des époux GARDÈS-CAMARÈS:  
 "...Qu'il résulte en effet que GARDÈS a frappé cette dernière, lui a craché au visage, lui a adressé des paroles injurieuses et lui a fait des scènes d'une extrême violence que dès lors la vie commune des époux ne pouvait exister sans danger pour la femme, c'est le cas de prononcer la séparation de corps par elle demandée, Attendu que, vu les circonstances de la cause, la garde des enfants* qui a été confiée provisoirement à la femme doit être rendue définitive.... " (source : Archives Départementales de la Haute-Garonne)

* Les deux enfants dont Hélène CAMARÈS obtient la garde définitive sont Jean Marie GARDES et sa sœur Berthe GARDES, future mère de Carlos GARDEL.

Le recensement de Toulouse de 1872 confirme la séparation des époux qui vivent désormais à deux adresses différentes :  Vital GARDES habite 16 rue Palaprat avec sa mère et sa sœur cadette :

Fig 16: Recensement de Toulouse de 1872 - 16, rue Palaprat, famille N° 73. (© Archives Municipales de Toulouse)






15 BONNEFOY veuve GARDÈS Pascalefait son ménage62 ansnée à Toulouse
16 GARDÈS VitalPlâtrier36 ansné à Toulouse
17 GARDES AnneModiste30 ansnée à Toulouse




Hélène CAMARÈS habite 4 rue des prêtres avec ses deux enfants et une domestique.



Fig 17: Recensement de Toulouse de 1872: 4 rue des prêtres, famille N° 19 (© Archives Municipales de Toulouse)


7 CAMARÈS femme GARDÈSHélènemodiste33 ansnée à Albi (Tarn)
8 GARDÈS Jean Marieson fils8 ansné à Toulouse
9 GARDÈS Berthesa fille6 ansnée à Toulouse
10 BORDES CyprienneDomestique19 ansnée à l'Isle Jourdain (Gers)

Du fait de sa séparation avec Vital GARDÈS, Hélène CAMARÈS, qui exerce la profession de modiste, est dénommée femme GARDÈS et non épouse GARDÈS. Une domestique s'occupe du ménage et des enfants. Ceci confirme la déclaration faite par Berthe GARDES en 1936 : "ma mère était modiste et avait de bonnes clientes ". 

On retrouve la trace de l'atelier de modiste d' Hélène CAMARÈS dans l'Annuaire de la Haute Garonne de 1872 . Il est mentionné dans la rubrique " MODE ET MODISTES " sous le nom de  Madame GARDÉS, rue des Prêtres, 6,  c'est à dire  la maison voisine de celle où elle habitait.

Fig 18: Annuaire de la Haute Garonne 1872 pages 358-359: Rubrique Mode et Modistes, Madame GARDÉS, 6 rue des prêtres (© Archives Municipales de Toulouse)


L'annuaire de la Haute-Garonne de l'année suivante ne mentionne plus le magasin de " Madame GARDÉS ", car l'année 1873 marque le début d'un long parcours d' Hélène CAMARÈS et de ses enfants en compagnie de Louis CARICHOU.

 B/  Présence de Louis CARICHOU à Toulouse

On ne connaît pas les causes exactes qui ont poussé Louis CARICHOU, bijoutier de profession, à quitter Saumur pour venir à Toulouse, mais on peut citer deux raisons possibles :

1- La présence à Toulouse de Louis PEYRONNET, l'ancien ouvrier bijoutier de Dominique CARICHOU qui est un ami de longue date de la famille et qui est venu à Saumur en 1866 pour le mariage de Charles CARICHOU.

2- C'est aussi à Toulouse que vit sa tante Catherine CARICHOU. Elle est mariée avec Joseph BRUN, et leur fils qui se prénomme Joseph est bijoutier, comme Louis CARICHOU. Ils habitent Rue des Blanchers selon le recensement de Toulouse de 1872  :

Fig 19: Recensement de Toulouse de 1872 - 127 Rue des Blanchers, famille BRUN (© Archives Municipales de Toulouse)



21 BRUN JosephPropriétaire51 ansné à Bruguières (Haute-Garonne)
22 BRUN JosephBijoutier27 ansné à Toulouse
23 CARICHOU
Épouse BRUN
CatherinePropriétaire51 ansnée à Puydaniel (Haute-Garonne)



Il est fort possible que Louis CARICHOU soit parti à Toulouse pour apprendre le métier de bijoutier dans le but de prendre la direction de l'atelier de son père à Saumur, du fait que son frère aîné Charles, négociant en vins, n'était pas intéressé par cette voie. Cependant, sa rencontre avec Hélène CAMARÈS et la naissance de sa fille Blanche Hélène vont changer le cours de son existence.


C/    Départ pour le Venezuela :

En janvier 1875, Louis CARICHOU, Hélène CAMARÈS et ses deux enfants s'embarquent pour le Venezuela depuis Bordeaux.

Dans son interview, Berthe GARDES avait évoqué deux destinations possibles, l’Uruguay ou le Venezuela. La destination finale fût choisie selon les départs des navires. Si Hélène CAMARÈS et Louis CARICHOU auraient opté pour l’Uruguay, la destinée de Berthe GARDES aurait été bien différente et  la venue au monde de Carlos GARDEL peu probable.

Dans son travail de recherche sur l’émigration vers le Venezuela depuis le port de Bordeaux[9], Bernard Lavallé indique que cette émigration qui était inexistante a brusquement augmenté en 1874 et 1875 à la suite d’une campagne de presse du gouvernement vénézuélien qui présentait le Venezuela comme un pays très attractif. Plusieurs compagnies maritimes ouvrirent une ligne  Bordeaux-Antilles-Venezuela pour satisfaire la demande. Mais les arrivants déchantèrent bien vite. La consultation des archives diplomatiques françaises rapporte que les consulats de France du Venezuela alertèrent les autorités françaises du désarroi des migrants à leur arrivée sur le sol vénézuélien et de la tromperie dont ils furent victimes.

Louis CARICHOU, Hélène CAMARÈS et ses deux enfants firent partie des 659 français qui émigrèrent vers ce pays en 1875[10]. Dans un rapport daté du mois de mars de la même année, le vice consul de France de Puerto Cabello évoque la situation déplorable des immigrants français vivant au Venezuela. Le registre des embarquements et débarquements, porte trace d’indigents qui sont rapatriés en France aux frais du consulat, en plus de  marins dont le navire a fait naufrage, ainsi que des jeunes gens  qui doivent accomplir leur service militaire, et dont le voyage est pris en charge par le ministère de la guerre. Le consulat général, qui a passé des conventions avec la « Compagnie Générale Transatlantique », délivre des ordres d’embarquement sur des navires français.

La situation politique et économique du pays est aussi évoquée. Le pays est sujet aux troubles. En 1872, de nombreuses plaintes de français ont été enregistrées à cause de la guerre civile. Une liste de réclamations a été dressée par les différents consulats de France du Venezuela. Elles sont accompagnées du montant des indemnités réclamées au gouvernement vénézuélien au bénéfice de français qui ont été dépouillés arbitrairement de leurs biens ou dont les habitations ont étés saccagées par les soldats. On relève des vols de bétail, des pillages de magasins, des destructions d’habitations, et même des assassinats[11].

Le 14 janvier 1879, le Vice consul signale une épidémie de fièvre jaune à Puerto Cabello. En 1881, de graves troubles secouent le  pays, les liaisons de la capitale avec Puerto Cabello sont coupées, et ce port ne reçoit plus de marchandises. Les bateaux sont déroutés sur La Guaira, le port de Caracas. Les relations entre le Venezuela et la France s’enveniment. Un courrier interne déplorant l’attitude irrespectueuse des autorités vénézuéliennes envers la France, demande aux consuls de refuser toute invitation officielle. Vers la fin de l’année 1881, la correspondance diplomatique du consulat français de Puerto Cabello porte la mention « Relations interrompues ».
C’est le consulat des Pays-Bas qui prend en charge les affaires du consulat français.

On peut donc penser que cette situation précaire et probablement dangereuse motivera sept ans après leur arrivée, le retour en France de Louis CARICHOU, d’Hélène CAMARÈS et de leurs enfants.

D/   Séjour au Venezuela de Louis CARICHOU et d’Hélène CAMARÈS

Pour partir au Venezuela, Louis CARICHOU, Hélène CAMARÈS et ses deux enfants firent établir des passeports, dont les souches sont conservées à Bordeaux,  aux archives départementales de la Gironde.

Fig 20: Passeports d'Hélène CAMARÈS et de Louis CARICHOU pour le Venezuela. (© Archives Départamentales de la Gironde)























































Les deux passeports portant les numéros 33 et 32 sont datés du 14 janvier 1875

Hélène CAMARÈS est mentionnée " femme GARDÈS ", ce qui confirme sa séparation avec son mari. Elle est modiste et emmène avec elle ses deux enfants : Jean Marie, 13 ans et Berthe, 8 ans.
Louis Alphonse Julien CARICHOU est domestique (Il n'est plus bijoutier comme précédemment). Tous deux déclarent habiter Bordeaux. Cela laisse penser qu'ils ont quitté Toulouse pour échapper à une condamnation pour adultère, et que pour éviter des poursuites judiciaires, ils cherchent à quitter la France. Blanche Hélène, fille naturelle de Louis CARICHOU n'est pas mentionnée sur son passeport et malgré les recherches entreprises nous n'avons pas retrouvé sa trace. On ne sait pas pour l'instant, ce qu'il est advenu d'elle.

Les passeports sont délivrés pour le Venezuela dont la voie maritime depuis Bordeaux passe par les Antilles Françaises. De là, des bateaux font du cabotage et transportent passagers et  marchandises vers les ports vénézuéliens de Puerto Cabello et La Guaira. A titre d'exemple, voici un extrait du livre de bord du paquebot " Ville de Bordeaux " qui mentionne les escales suivantes :

21 mai 1875 :  Arrivée à Fort de France (Martinique) en provenance de Pointe à Pitre (Guadeloupe)
21 mai 1875 : Départ de Fort de France pour La Guaira – port de Caracas (Venezuela)
23 mai  1875 : arrivée à La Guaira
24 mai 1875 : départ pour Porto-Cabello (sic) ( Venezuela).
25 mai 1875 : arrivée à Pto Cabello (sic)
25 mai 1875 : départ pour Colón (Panama)

Fig 21: Extrait du rôle d'équipage du paquebot "Ville de Bordeaux" (© Archives départamentales de la Loire Atlantique)


C'est au Venezuela que naît le 11 février 1876 Carlos CARICHOU, fils de Louis CARICHOU et de mère inconnue, comme le précise son acte de mariage enregistré à Albi, le 16 novembre 1909. Nous retrouvons les mêmes indications que sur l'acte de naissance de Blanche Hélène CARICHOU.  Même au Venezuela, Louis CARICHOU n'a pas voulu révéler le nom de la mère de l'enfant.

Fig 22: Extrait de l'acte de mariage de Carlos CARICHOU avec Reine Paule Marie Rose Cécile LOUBIÈRES (© Archives Départamentales du Tarn)
























Extrait du texte :
" L'an 1909, le 16 novembre à 11heures du matin, par devant nous, Henri BARBÉS, adjoint au maire de la commune de Albi, chef  lieu du département du Tarn, délégué aux fonctions d'Officier de l'état civil sont comparus en la maison commune et publiquement le sieur Carlos CARICHOU, adjudant au 2ème régiment d'artillerie coloniale, âgé de 33 ans, né à Puerto Cabello (Venezuela) le 11 février 1876 ainsi qu'il résulte de l'acte de naissance ci-annexé, en garnison à Brest (Finistère), domicilié à Toulouse (Haute-Garonne), fils majeur naturel de Louis CARICHOU et de mère inconnue, le dit Carlos CARICHOU autorisé à contracter mariage par le Conseil d'Administration du 2ème régiment d'Artillerie coloniale suivant la permission ci-annexée en date du 4 octobre dernier d'une part,
et Demoiselle Reine Paule Marie Rose Cécile LOUBIÈRES, sans profession, âgée de 17 ans "....

Comme indiqué précédemment, le séjour au Venezuela durera 7 ans, et Louis CARICHOU, Hélène CAMARÈS et leurs enfants respectifs retourneront en France en 1882 pour s'installer à Bordeaux. C'est ce que révèle le feuillet matricule de Jean Marie GARDES daté de 1883 et donnant comme adresse 32  Rue Prunier à Bordeaux.

Fig 23: Extrait du feuillet matricule de Jean Marie GARDES (© Archives Départamentales de la Gironde)




















4- CHARLES CARICHOU, CHEF D'ENTREPRISE A SAUMUR

Le 28 août 1880, par acte signé devant notaire, Charles CARICHOU s'associe pour une durée de 10 ans à la veuve de son beau-père Angelo BOLOGNESI. En ajoutant la direction de la distillerie familiale de liqueurs à ses propres activités de négociant en vins, Charles CARICHOU devient à présent une  personnalité importante de Saumur.
Pendant une dizaine d'années il connaîtra les succès et les honneurs :
 -En septembre 1882, la distillerie remporte une médaille d'argent à l'exposition de Bordeaux[12]
- En mai 1884, elle obtient la grande médaille d'or à l'exposition de Nice[13]
- En juillet 1887, Charles CARICHOU est nommé membre du jury à l'exposition internationale du   Havre.

Charles CARICHOU devient également président de l'Harmonie Saumuroise[14], et fonde le journal  " l'Idée Moderne "[15]. En 1888, il reçoit dans sa maison le général turc Chakir-Pacha et sa délégation venus à Saumur pour assister aux manœuvres de l'armée française[16]. L'Empire Ottoman le décorera de l'Ordre Impérial du Medjidé pour services rendus[17]. Il sera également décoré de l'ordre du Nichan Iftikar par le Bey de Tunis[18]






       
MARQUES ET BREVETS DÉPOSÉS PAR CHARLES CARICHOU

Fig 26: Extrait de l'annuaire de la marine de commerce de 1885


Charles CARICHOU qui est négociant en vins et directeur de la distillerie de son défunt beau-père, cherche à développer ses activités commerciales dans plusieurs domaines :



1- Produits pour l’exportation:

L’entreprise Angelo Bolognesi-E. Carichou (en réalité : C. CARICHOU) est habilitée pour l’exportation des liqueurs.


Fig 27: Extrait du catalogue des produits pour l'exportation de 1887


2- Marques déposées:

En 1887 : Charles CARICHOU dépose la marque « Saint CHARLES » au nom de la société  Veuve Angélo BOLOGNESI-Charles CARICHOU.


-En 1888, Charles CARICHOU enregistre au tribunal de commerce de Saumur la marque "PASTEUR" pour commercialiser différents produits dans les domaines de la confiserie et pâtisserie,  la parfumerie ainsi que des boissons alcoolisées comme le vin, la liqueur ou les eaux de vie. Pour donner un caractère sérieux à ses produits, Charles CARICHOU choisit comme marque commerciale le nom du grand savant, célèbre pour son vaccin contre la rage mis au point en 1885 !




Fig 28: Formats d'étquettes de bouteilles de vin mousseux déposés par Charles Carichou au greffe du tribunal de commerce de Saumur (source: BNF - gallica)



















































































3- Brevets déposés :

En 1888, Charles CARICHOU dépose deux brevets concernant la protection des vignes et même un tapis pour cartes à jouer.

Fig 32: Brevet N° 188 988 pour un abri protecteur de la vigne (Source: BNF - gallica)









Fig 33: Brevet N° 188 678 pour tapis de cartes à jouer (Source: BNF - gallica)









En cette deuxième moitié du 19ème siècle, le vignoble français est ravagé par le phylloxéra, un puceron qui suce les racines des vignes et finit par les dessécher, et par le mildiou, un champignon qui s'attaque aux feuilles de vigne. Les dégâts sont considérables et beaucoup de chercheurs se mobilisent pour endiguer ces maux qui progressent inexorablement en France et dans le monde entier, excepté en Amérique. On finit par trouver une parade au phylloxéra en greffant les plants de vignes français sur des plants américains. Contre le mildiou, on procède à des vaporisations de sulfate de cuivre sur le feuillage des vignes.        

L'année 1889 marque un tournant dans les activités de Charles CARICHOU qui abandonne la fabrication de liqueurs et le commerce des vins. La société qu'il avait créé en commun avec la veuve d'Angélo BOLOGNESI est dissoute[19], et la distillerie de Saumur est confiée à un gérant, Léon BLOUDEAU.
 
A présent, Charles CARICHOU veut se consacrer pleinement à la commercialisation d'une découverte faite par son père Dominique CARICHOU qui n'exerce plus d'activité professionnelle depuis la mort de son épouse Louise Jeanne JOURDAN, dont voici l’acte de décès.

Fig 34: Acte de décès de Louise Jeanne JOURDAN, épouse de Dominique Étienne CARICHOU ( © Archives Départamentales du Maine et Loire)


Cet acte de décès est rédigé ainsi : "  Aujourd'hui, 4 mars 1889 à 10 heures du matin, par devant nous, Louis LIENARD, adjoint délégué du Maire de la Ville de Saumur (Maine et Loire), remplissant les fonctions d'officier public de l'État-Civil ont comparu à la Mairie Hippolyte CARICHOU, profession de négociant, officier de l'ordre du Medjidé, âgé de 45 ans, domicilié à Saumur et M. Louis CARICHOU, profession d’ Ajusteur Mécanicien, âgé de 41 ans, domicilié à Bordeaux (Gironde). Tous deux fils de la défunte.   Lesquels nous ont déclaré que ce jour, à une heure du matin est décédée à son domicile, en cette ville, quai de Limoges, 10, Louise Jeanne JOURDAN.....  "

Cet acte révèle que Louis CARICHOU a fait le voyage de Bordeaux à Saumur pour accompagner sa mère dans ses derniers moments d'existence. Il ignore que cet événement aura de grandes répercussions.


5- L'ANTI-KYPROS – (Procédé de traitement du vin contre les résidus de cuivre).

Fig 35: "DU CUIVRE comme poison dans les vins", fascicule d'Antoine BOURGOIN (Source: BNF - gallica)




Le sulfate de cuivre utilisé par les vignerons pour traiter la vigne contre le mildiou provoque la présence de résidus de cuivre dans le vin qui dégradent son goût. Dominique CARICHOU utilisait dans la fabrication de médailles religieuses un procédé dont il avait le secret pour enlever les traces de cuivre sur l'or ou l'argent. Son fils Charles CARICHOU, convaincu de l'efficacité de ce procédé veut l'appliquer pour purifier le vin des impuretés de cuivre et il propose à son frère Louis de collaborer à son entreprise. Dans un fascicule qu'il a fait imprimer en 1890, et dont un exemplaire est conservé à la B.N.F[20] à Paris, on lit en page 20 de cet ouvrage :

Extrait de la page 20 :

Anti-Kypros ou Anti-Cuivre.

"  …............. M. Dominique CARICHOU, métallurgiste distingué, résidant à Saumur (Maine et Loire), dans une période de travaux de près de 60 ans sur les métaux, avait remarqué dans l'épuration de l'or et l'argent, l’affinité puissante des sels de cuivre pour certaines matières simples dans leur constitution et inoffensives dans leur emploi ;...... le secret serait tombé dans l'oubli si cette question de cuivre dans les vins n'était venue à juste titre préoccuper les esprits. C'est alors que ce vénérable vieillard fit part à ses deux fils, MM Charles et Louis CARICHOU, du résultat de ses longues et judicieuses observations ; ces messieurs comprirent immédiatement les services immenses que pouvait rendre l'application de ce procédé au traitement des vins provenant des vignes sulfatées...... "

Ce texte, écrit par Antoine BOURGOIN, présente les choses d'une manière trop pompeuse pour être plausible. En vérité, Charles CARICHOU, qui a une grande expérience du monde viticole, mène seul cette affaire.




6- INSTALLATION DE LOUIS CARICHOU et D' HÉLÈNE CAMARÈS A SAUMUR

Fig 36: Journal "L'Écho Saumurois" du 15 octobre 1890 (© Archives de Saumur)
Répondant à l'appel de son frère Charles pour commercialiser ce procédé qui aura pour nom " ANTI-KYPROS " (du mot grec kypros signifiant cuivre), Louis CARICHOU et Hélène CAMARÈS vont quitter Bordeaux pour s'installer à Saumur. En se basant sur les deux documents suivants, on peut déduire que ce déménagement s'est produit durant l'année 1890 :

1°- Le 27 décembre 1889, le jugement de divorce d'Hélène CAMARÈS avec Vital GARDÉS est prononcé à Toulouse[21]. Le compte rendu mentionne qu'Hélène CAMARÈS habite à   Bordeaux. 

2° - Le 15 octobre 1890, le journal " L'Écho saumurois " cite la présence à Saumur de Louis       et Charles CARICHOU pour la fabrication de l’ "Anti-kypros".



 Recensement de Saumur de 1891

Le recensement de Saumur de 1891 confirme la présence de la famille CARICHOU à Beaulieu et Dampierre sur Loire, deux hameaux proches de Saumur. Elle est répartie dans trois maisons situées sur la route de Beaulieu.
On trouve dans l'ordre croissant des numéros des maisons :

1- au N°9  route de Beaulieu :  Charles CARICHOU

Fig 37: Recensement de Saumur-Beaulieu 1891 - Famille de Charles CARICHOU (© Archives de Saumur)



Famille N°11 :
23 CARICHOU Charles Bernard47 ansFrançaisNégociant en spiritueuxchef
24 CARICHOU Anne Marie Thérèse42 ansidSans professionfemme
25 LAMBLEU Jeanne Marguerite46 ansidemployée aux écrituresDomestique
26 TROTTIER Alain28 ansidCocherid
27 TROTTIER Célestine23 ansidCuisinièrefemme du domestique
28 FROIDEFOND Jean24 ansidJardinierDomestique
29 BOURGOIN Antoine34 ansidProfesseur d'AgricultureEmployé



Charles CARICHOU vit avec son épouse Thérèse BOLOGNESI et 5 autres personnes. Il habite la villa ANGELO, une grande demeure que son beau père Angelo BOLOGNESI avait fait construire. Il emploie trois domestiques : un cocher, un jardinier et une cuisinière, et deux autres personnes pour les besoins de la vente de son nouveau produit : l'Anti-Kypros : ce sont Jeanne Marguerite LAMBLEU, employée aux écritures et Antoine BOURGOIN, professeur d'Agriculture. (C'est cette personne qui a rédigé le fascicule " DU CUIVRE comme poison dans le vin " dont la couverture est présentée en figure 35). C'est à partir de la villa ANGELO que Charles CARICHOU dirige ses affaires.

 Nota : Les deux enfants de Charles CARICHOU : Georges et Louis, nés en 1868 et 1875 ne sont pas présents au domicile des parents. Georges Étienne Angelo CARICHOU réside à Saumur, rue de Poitiers[22], et épousera en décembre 1901 Rose Gabrielle Marguerite Louise MARIE à Courbevoie, une commune située au nord de Paris. Son jeune frère, Louis Édouard Émile CARICHOU, âgé de 16 ans, fait des études en pensionnat.


2- Au N° 23 route de Beaulieu : Louis CARICHOU et Hélène CAMARÉS


Fig 38: Recensement de Saumur-Beaulieu 1891 - Famille Louis CARICHOU (© Archives de Saumur)


Famille N°26 
7 CARICHOU Louis43 ansFrançaisReprésentant de CommerceChef
8 CARICHOU Hélène47 ansFrançaiseSans professionfemme
9 CARICHOU Carlos15 ansFrançaisidfils


Contrairement à leurs déclarations, Louis CARICHOU et Hélène CAMARÉS ne sont pas mariés. Carlos CARICHOU, né au Venezuela en 1876 vit avec ses parents.

Fig 39: Extrait du feuillet matricule de Jean Marie GARDES - Localités successives habitées (© Archives Départamentales de la Gironde)
 Par contre, Berthe GARDES n'a pas suivi sa mère lorsque la décision de quitter Bordeaux pour aller à Saumur a été prise en 1890. Au lieu de la suivre à Saumur, elle a préféré aller seule à Toulouse, et après la naissance de son fils Charles Romuald, elle n'est pas allé rejoindre sa mère.

Son frère, Jean Marie GARDES est au Venezuela, selon les indications portées sur son feuillet matricule présenté ci-après. Il ne retournera à Saumur-Beaulieu qu'en mai 1891, c'est à dire après le passage du recensement qui se fait habituellement durant le premier trimestre de l'année.







3- Au N° 96 route de Beaulieu :  Dominique CARICHOU ( père de Charles et Louis CARICHOU)

Fig 40: Recensement de Dampierre sur Loire 1891 - Dominique CARICHOU (© Archives de Saumur)







Famille N°100 :

17        CARICHOU      Dominique      73 ans    Français      Rentier       Chef de ménage



Dominique CARICHOU est veuf depuis 1889. Il vit seul et n'exerce plus d'activité.


7- COMMERCIALISATION DE L'ANTI-KYPROS

Le 19 octobre 1889, un brevet de 15 ans concernant un "Mode de traitement des vins, boissons de marc de raisin et autres provenant des vignes sulfatées " est déposé à Paris et enregistré sous le numéro 201 652  par les " sieurs " CARICHOU. Ce brevet est officialisé le 14 novembre 1889 dans le bulletin des lois de la République Française.


Fig 41: Dépôt du brevet sur le traitement des vins (source: BNF - gallica)


En 1890, Charles CARICHOU lance la fabrication de l'Anti-Kypros. Il recrute des agents commerciaux au moyen de petites annonces dans la presse et participe à des concours dans de nombreuses expositions nationales et internationales pour présenter son produit. Il fera de la publicité dans la presse et fera rédiger des articles qui citeront toutes les récompenses plus ou moins prestigieuses remportées par l'Anti-Kypros. 


Fig 42: Extraits d'articles de presse sur l'Anti-Kypros



       


Fig 43: Journal "L'Écho Saumurois" du 18 août 1893
concours de greffage (© Archives de Saumur)

Malheureusement, l'Anti-Kypros sur lequel Charles CARICHOU avait fondé tous ses espoirs se révélera être un échec commercial. La dernière mention concernant l'Anti-Kypros dans la presse date du 15 février 1891, et le 23 juin de cette même année Charles CARICHOU se sépare de son collaborateur Antoine BOURGOIN [23] . Le départ de ce collaborateur annonce l'échec de L'Anti-Kypros. Le journal " l'Écho saumurois " fera encore mention de Charles CARICHOU en 1893 au sujet d' un concours de greffage de plants de vigne français sur des plants américains. Charles CARICHOU y est simplement cité comme  " correspondant-délégué " d'une entreprise de Chalons sur Saône qui commercialise des "  tubes cônes ouverts " pour faciliter le greffage.



8- SÉPARATION DE LA FAMILLE CARICHOU

Cet échec commercial va précipiter le départ de Saumur de tout le groupe familial.

-        Jean Marie GARDES arrivé à Saumur le 25 mai 1891, épouse le 12 juillet 1892 Eugénie Clémentine ROBIN. L'acte de mariage précise qu'il est mécanicien, et qu'il habite à Paris.

-        Le 22 avril 1893, Émile Albert CAMARÈS, un neveu d'Hélène CAMARÈS, épouse à Saumur Marie Louise POUARD. Jules Barthélemy CAMARÈS (père du marié), et Maria CAMARÈS (sœur du marié), sont venus d'Albi pour assister au mariage, et leurs signatures apparaissent au bas de l'acte. Par contre on ne trouve aucune signature d'Hélène CAMARÈS ou de Louis CARICHOU, ce qui semble indiquer qu'ils ont quitté Saumur à cette date.



Fig 44: Signatures au bas de l'acte de mariage d'Émile Albert CAMARÈS avec Marie Louise POUARD (© Archives départamentales du Maine et Loire)

























Vente aux enchères :

L'échec commercial de l'Anti-Kypros aggravé par les dépenses importantes de Charles CARICHOU en publicité, achat de matériel, rémunération du personnel, voyages en France et à l'étranger, provoque la faillite de sa belle mère, veuve d' Angélo BOLOGNESI. De toute évidence, elle s'était portée garante des sommes empruntées par son beau-fils, et qu'il ne pouvait pas rembourser.

1/   Le 18 juillet 1894 a lieu à Saumur la vente aux enchères des biens ayant appartenu à Angelo BOLOGNESI : les bâtiments de la distillerie de Saumur, la villa Angelo où habitait Charles CARICHOU, et la maison de Beaulieu où ont habité Hélène CAMARÈS et Louis CARICHOU.

2/   Puis, le 4 Août 1894 a lieu une deuxième adjudication de biens par " concordat par abandon d'actifs " un système plus avantageux pour les créanciers qu'une faillite, concernant une maison et ses dépendances située à Bagneux près de Saumur et appartenant également à la veuve d'Angélo BOLOGNESI qui se trouve ainsi dépouillée de tous ses biens. Charles CARICHOU est ruiné et il a entraîné sa belle mère dans sa déroute financière.


Fig 45: Vente aux enchères des biens de la veuve d'Angelo BOLOGNESI. (Source: Journal "L'Écho Saumurois" - © Archives de Saumur)


            
Dans l'encadré de la figure 45 on peut lire que Charles CARICHOU n'habite plus à Saumur, mais à Saint-Nazaire (port sur l'océan Atlantique situé à 200 km environ de Saumur). En réalité, l'acte de décès de son père Dominique CARICHOU, daté du 17 octobre 1894, est plus précis et nous informe mieux sur la situation exacte de Charles CARICHOU.

L'acte est rédigé ainsi :
"L'an 1894, le 17 octobre à midi, par devant nous, Augustin MAILLARD,conseiller général, maire, officier de l'état-civil de la commune du Croisic, arrondissement de Saint-Nazaire, département de la Loire Inférieure ont comparu :  MM CARICHOU  Charles, âgé de 50 ans, représentant de commerce, domicilié au Croisic, fils du défunt, et CARICHOU Georges, âgé de 26 ans, restaurateur, domicilié au Croisic, petit fils du défunt lesquels nous ont déclaré que le jour d'hui 17 octobre de la présente année à 10 heures et demie du matin, Étienne Dominique CARICHOU, âgé de 77 ans, ..domicilié au Croisic...veuf de Louise Jeanne JOURDAN est décédé en sa demeure sise quai de la petite  chambre....."


Fig 46: Acte de décès de Dominique Étienne CARICHOU (© Archives Départamentales de Loire Atlantique)

L'examen attentif de cet acte de décès révèle une situation précaire. Le défunt, Dominique CARICHOU, son fils Charles et son petit-fils Georges résident tous les trois au Croisic, un petit port de pêche situé à 30 km de Saint-Nazaire (et à 230 km de Saumur !). L'acte de décès ne mentionne qu'un seul domicile pour les trois personnes citées ce qui signifie qu'elles vivaient toutes les trois au même endroit.

Pour Charles CARICHOU, la situation n'est pas brillante. Il a trouvé refuge chez son fils Georges, restaurateur. Il n'a plus de domicile personnel et en 1896 il sera contraint de vendre aux enchères, pour éponger ses dettes, la maison de son père située à Dampierre, près de Saumur, dont il a hérité.[24].

On ne connaît pas la raison exacte qui a poussé Dominique CARICHOU à suivre ses deux fils pour mourir à l'âge de 77 ans si loin de Saumur. Etait-il impliqué dans les affaires de son fils Charles? La question est en suspens.


Conséquences familiales :

En 1893, l'échec commercial de l'Anti-Kypros provoque le départ de Saumur d'Hélène CAMARÈS, de Louis CARICHOU et de leur fils Carlos. Ils vont à Paris où réside Jean Marie GARDES. La même année, Berthe GARDES part en Argentine avec son fils Charles Romuald.

Le 18 juin 1896 Carlos CARICHOU, âgé de vingt ans, s'engage dans l'artillerie de marine. Il fera une carrière militaire et effectuera des séjours en Indochine. (aujourd'hui le Vietnam).

Le 23 juillet 1898, Jean Marie GARDES épouse en secondes noces, à Saint Mandé (près de Paris) Charlotte LAURENCE. Sur l'acte de mariage, Hélène CAMARÈS et Louis CARICHOU qui ne sont pas encore mariés habitent à Paris, 6 rue des entrepreneurs.

En résumé, Charles CARICHOU, qui avait engagé son frère Louis dans l'aventure désastreuse de l'Anti-Kypros à Saumur, a finalement provoqué l'éclatement de sa famille.

Nota : Berthe GARDES avait déclaré que ses relations avec sa mère étaient difficiles. Mais elle ne semble pas être la seule à avoir éprouvé ce sentiment. A son retour du service militaire, son frère Jean Marie n'est pas resté chez sa mère, il est parti au Venezuela, puis de retour en France, il s'est installé à Paris avec sa première épouse Jeanne Eugénie ROBIN( qui décédera en 1894). De même, Carlos CARICHOU a quitté le domicile familial à l'âge de 20 ans pour s'engager dans l'artillerie de marine.


Fig 47: Dissolution de la Société Charles CARICHOU et Cie, fabrication de fromages

Quant à Charles CARICHOU, il est à présent un simple représentant de commerce. Il mènera une vie chaotique et changera souvent de résidence :


 En 1998, il fonde à Neuilly sur Seine, près de Paris, une société de vente de fromages qui disparaît
au bout de 6 mois[25].

Fig 48: Charles CARICHOU, directeur pour l'arrondissement de
Saumur de la société des Timbres de l'Anjou. (Journal "L'Écho
Sumurois" du 1er novembre 1903 - © Archives de Saumur)


En 1903, Charles CARICHOU est de retour à Saumur et gère la vente de timbres, mais cela ne dure que quelques mois et il est renvoyé de son poste.
C'est la dernière trace que nous possédons de Charles CARICHOU. Il a probablement vécu ses dernières années dans la région parisienne et dans des conditions financières difficiles, car en 1920, sa veuve, Thérèse BOLOGNESI, dans le besoin, fera une demande d'aide financière à la ville de Paris, demande qui lui sera refusée[26].





9- DEPART POUR L'AFRIQUE de Jean Marie GARDES et LOUIS CARICHOU


Louis CARICHOU va suivre une voie très différente de celle de son frère Charles. Il va rejoindre Jean Marie GARDES au cœur de l'Afrique Occidentale Française. Il sera chef mécanicien sur la ligne de chemin de fer Kayes-Niger, comme le révèle cette demande de congés de convalescence daté du 5 Août 1903.


Fig 49: Bulletin Administratif du Gouvernement Général de l'Afrique Occidentale Française, N° 8 Août 1903 (Source: BNF - gallica)



Nota :Cette ligne de chemin de fer longue de 555 kilomètres et reliant Kayes à Koulikoro dans l'actuel Mali fut commencée en 1881. Elle faisait partie d'un projet de la France pour relier le port de Dakar (Sénégal) au fleuve Niger par voie ferroviaire. Ce projet sera finalement achevé par les militaires. Le tracé final long de 1200 km sera terminé en 1924.

Jean Marie GARDES est affecté aux Chemins de fer du Sénégal le 28 novembre 1901 selon les indications recueillies sur son feuillet matricule :

Fig 50: Extrait du feuillet matricule de Jean Marie GARDES. (© Archives Départamentales de la Gironde)


            
On lit dans l'encadré  : " Réintégré à la subdivision de Bordeaux le 10 décembre 1901 comme non disponible de la Compagnie des chemins de fer du Sénégal du 28 novembre 1901 ".

Les chemins de fer du Sénégal exploitaient une autre ligne de chemin de fer longue de 265 kilomètres reliant le port de Dakar à St Louis du Sénégal[27]. Ainsi, au début de leur présence en Afrique, Jean Marie GARDES et Louis CARICHOU ne travaillaient pas sur la même ligne ferroviaire.

Cette situation ne durera pas trop longtemps car un document ultérieur daté de Novembre 1906 précise que tous deux sont employés sur la ligne Kayes-Niger dans la section "traction".

Fig 51: Liste du personnel de la ligne Kayes-Niger, Novembre 1906 (Source: Tavaux aux Archives de Bamako (Mali) de Mr. Jones, étudiant à la west Chester University en Pennsylvanie) 



           
Les  comptes et dépenses définitifs de l'année 1920 de la ligne Kayes-Niger conservés à la Bibliothèque Nationale de France indiquent que Louis CARICHOU a touché ses dernières allocations temporaires en 1919, en tant que sous-chef de dépôt à la gare de Kayes. Il a donc pris sa retraite en 1918 à l'âge de 70 ans. Jean Marie GARDES a perçu des soldes de salaire pour les mois de septembre et d' octobre 1919, qui sont ses derniers mois d'activité. Il occupait le poste important de chef traction de la ligne Kayes-Niger.


Fig 52: Extrait des comptes définitifs des recettes et dépenses de la ligne Kayes-Niger 1920 (pour l'année 1919). Source: BNF - gallica




Retour à Toulouse

En 1921, année du recensement de la population française, Louis CARICHOU et Jean Marie GARDES habitent à Toulouse.

Fig 53: Recensement de Toulouse 1921 - 12 allées de Barcelone (© Archives Municipales de Toulouse)


















Famille N° 37
99 GARDES Jeanné en 1863(à Toulouse)(Français)ChefSans profession
100 GARDES Charlottenée en 1869à ParisidÉpouseSans profession
101 CARICHOU Louisné en 1847à SaumuridBeau pèreSans profession
102 CARICHOU Hélènenée en 1839à AlbiidBelle mèreSans profession



9- CARLOS CARICHOU – MORT POUR LA FRANCE.


Après son engagement dans l’artillerie coloniale en 1896, Carlos CARICHOU retourne à la vie civile le 10 décembre 1910. Peu avant cette date, Le conseil d’administration de son régiment lui avait accordé une permission pour épouser Reine LOUBIERES à la mairie d’Albi.



Fig 54: Journal "La Dépêche" du 5 novembre 1909 - Publication de Mariage de Carlos CARICHOU et Reine LOUBIÈRES (Source: BNF - gallica)






            
Marié depuis 5 années et exerçant la profession de comptable, Carlos CARICHOU qui est passé dans la réserve de l’armée active le 18 juin 1911, est rappelé à l’activité militaire par le décret de mobilisation générale du 1er août 1914. Il rejoint son unité, le 2ème régiment d’artillerie coloniale à Brest, le 4 août 1914 pour partir au combat contre l’Allemagne.
Il accomplira son devoir jusqu’à la fin. Le rapport militaire de son décès rapporte que Charles (en réalité Carlos) CARICHOU, adjudant au 212ème Régiment d'Artillerie de Campagne est « Mort pour la France » le 11octobre 1918, à 9h15 à l'ambulance (hôpital de campagne) 5/51 de Vitry le François, d'une maladie contractée en service commandé, et que l'acte de décès a été transmis à l'État-civil de Toulouse le 15 septembre 1919. La mention de la date et du lieu de naissance : 11 février 1876 à Puerto Cabello (Venezuela) prouve qu'il s'agit bien du fils de Louis CARICHOU. 

Fig 55: rapport militaire du décès de Charles CARICHOU, adjudant au 212ème régiment d'artillerie de Campagne (Source: https://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/ )




 Le site de la BNF (Bibliothèque Nationale de France) fournit de précieuses indications sur l'activité de son régiment d'artillerie à l'époque de son décès :

Fig 56: Ordre de Bataille à la date du 20 août 1918 du 212ème régiment
d'artillerie de campagne (source: BNF - gallica)







Comme l'indique l’organigramme ci-dessus, l'adjudant CARICHOU était Officier d’Approvisionnement du 1er Groupe de son régiment d'artillerie. Il avait en charge l’approvisionnement en munitions et en nourriture des 3 batteries de 4 canons de son groupe.(http://www.chtimiste.com/carnets/infos/canon%2075.htm)


L'historique du 212ème Régiment d'Artillerie de Campagne signale qu'après avoir soutenu une importante offensive victorieuse de l'armée américaine de juillet à septembre 1918 au nord de Verdun, le régiment est ensuite envoyé en Champagne. Le 2 Octobre 1918, l’État major et le 1er groupe du régiment dont fait partie l'Adjudant CARICHOU bivouaquent à Bassu, un village situé à 15 km au nord de Vitry le François. Le 5 octobre 1918 a lieu une prise d'armes pour remise de décorations. Puis le 11 octobre 1918, jour du décès de Carlos CARICHOU, le régiment quitte ses cantonnements. C'est donc dans le village de Bassu que l'Adjudant CARICHOU est tombé malade et qu'il a été transféré à l'ambulance 5/51 de Vitry le François où il est mort.
Fig 57: Extraits des pages 36 et 37 de l'historique du 212ème Régiment
d'artillerie de campagne (2 au 11 octobre 1918) - Source: BNF - gallica
 


Dans l'extrait de l'historique du 212ème régiment d'artillerie de campagne présenté ci dessus, il est mentionné que " L'épidémie de grippe qui depuis quelques jours a fait son apparition, sévit alors avec rage ; les batteries sont réduites à la moitié de leurs effectifs ". Cette épidémie, plus connue sous le nom de grippe espagnole, est donc la cause probable du décès de l'adjudant CARICHOU.

Si l'acte de décès officiel a été transmis à l'État civil de Toulouse le 15 septembre 1919, soit presque un an après sa mort, l'enregistrement du décès de Carlos CARICHOU est effectué à Toulouse, à l’État Major de la 17ème région militaire, le 14 novembre 1918. Un avis de décès a été ensuite remis au domicile de Louis CARICHOU, 12 allées de Barcelone, le 30 novembre 1918 comme le montre le document suivant :



Fig 58: Enregistrement du décès de "Charlos" CARICHOU à Toulouse (© Archives Municipales de Toulouse)




            
C'est donc après l'armistice du 11 novembre 1918, quand la guerre était finie, que les malheureux parents et l'épouse de Carlos CARICHOU ont appris la terrible nouvelle de sa mort.


10 – DERNIÈRES ANNÉES à TOULOUSE

Avant de partir à la guerre, Carlos CARICHOU et son épouse Reine LOUBIÈRES habitaient à Toulouse, 32[28] rue des marchands [29].

C'est probablement pour cette raison qu'après leur séjour en Afrique, Louis CARICHOU, Hélène CAMARÈS et Jean Marie GARDES avaient projeté de revenir à Toulouse après une longue absence de près de 45 ans. (On peut rappeler qu'ils avaient quitté Toulouse en 1873 pour aller à Bordeaux, puis au Venezuela, et n'y étaient plus revenus depuis).

Toulouse fut le dernier refuge de ces " voyageurs " après un long parcours qui les mena de France en Amérique, puis en Afrique après avoir séjourné successivement à Bordeaux, Saumur et Paris. C'est à Toulouse qu'ils reçurent à plusieurs reprises la visite de Berthe GARDES et de son fils Carlos GARDEL.

Ces deux êtres partis en Argentine leurs étaient très chers et les retrouvailles furent très émouvantes. Même dans la mort les liens familiaux furent indéfectibles comme le montrent les publications des avis de décès et de neuvaines de Louis CARICHOU et d'Hélène CAMARÈS, la grand mère maternelle de Carlos GARDEL, qui sont présentés ci-après. On peut constater que les noms de Berthe GARDES et de son fils Charles figurent en bonne place dans tous les avis mortuaires publiés par la presse de Toulouse.

 
Fig 59: Avis de décès et de neuvaine de Louis CARICHOU - Journal "La Dépêche" de Toulouse des 25 et 28 août 1930 (Source: BNF - gallica) 


Fig 60: Avis de décès et de neuvaine d'Hélène CAMARÈS, veuve CARICHOU - Journal "La Dépêche" de Toulouse des 22 et 29 août 1931 (Source: BNF - gallica)

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Nota : On lit dans les annonces mortuaires de Louis CARICHOU et Hélène CAMARÉS : "Madame Berthe GARDES et son fils Charles (de Buenos-Ayres)" , ce qui sous entend : son fils Charles Romuald GARDES (de Buenos-Ayres), c’est à dire le nom d’État Civil de Carlos GARDEL.

Avec la mort, à l'âge de 91 ans, d'Hélène CAMARÈS disparaît la dernière représentante portant le nom de CARICHOU. Son "esprit aventureux", comme le disait Berthe GARDES, aura marqué la vie de ses quatre enfants :  Jean Marie et Berthe GARDES puis Blanche Hélène et Carlos CARICHOU, officiellement nés de mère inconnue.

Cependant sa rencontre avec Louis CARICHOU, et l'influence exercée par Charles CARICHOU sur toute la famille ne sont pas totalement étrangers à l'éloignement des enfants : Berthe, partie en Argentine, Jean Marie, au Venezuela puis en Afrique et Carlos, le militaire, en Asie.

De Charles CARICHOU, il restera l'image d'un riche industriel ruiné par l'échec de son procédé pour le traitement du vin. A-t-il été victime de son ambition, ou bien tellement convaincu par son procédé, s'est il enfoncé dans les dettes ? La question reste posée.

Mais il nous reste de lui un prénom : Charles.

Son frère Louis CARICHOU l'a transmis à son fils né au Venezuela, sous sa forme espagnole : Carlos. Berthe GARDES, demi-sœur de Carlos CARICHOU, l'a ensuite transmis à son fils né à Toulouse le 11 décembre 1890.  Ainsi, à sa naissance, Charles Romuald GARDES, devenu  plus tard Carlos GARDEL portait en lui un héritage de la famille CARICHOU et certainement les désirs d'aventure et de voyage de sa grand mère Hélène CAMARÈS.


                                                           Georges GALOPA
Collaboration: Ana TURÓN  
                                                           Andolsheim (France) - Azul (Argentine)
Le 25 mai 2020          




Remerciements à Christine GLANDAIS des Archives de Saumur




[3]    Purge d'hypothèques parue dans " L'Écho saumurois " du 2 mai 1857.
[5]    De 1804 à 1907 la majorité matrimoniale en France était de 25 ans pour les garçons et 21 ans pour les filles. Dans ce cas, il fallait  obtenir le consentement des parents pour célébrer le mariage. Dans le cas contraire, la procédure pour aboutir au mariage était complexe.
[7]    Journal l'Écho saumurois du 2 avril 1870
[8]    Journal l'Écho saumurois du 9 avril 1893
[11]  Archives diplomatiques françaises-consulat de France de Caracas.
[12]  Journal l'Écho saumurois du 9 septembre 1882.
[13]  Journal l'Écho saumurois du 30 mai 1884.
[14]  Journal l'Écho saumurois du 14 février 1887,
[15]  Journal l'Écho saumurois du 21 décembre 1887.
[16]  Journal l'Écho saumurois du 17 septembre 1887
[17]  Journal l'Écho saumurois du 9 février 1888.
[18]  Journal l'Écho saumurois du 20 février 1889.
[19]  Journal l'Écho saumurois du 19 juillet 1889.
[20]  BNF : Bibliothèque Nationale de France
[21]  Le divorce fut rétabli en France le 27 juillet 1884 par la loi Naquet
[22]  Feuillet matricule militaire de Georges CARICHOU
[23]  Journal l'Écho saumurois du 24 juin 1891.
[24]  Journal l'Écho saumurois du 22 juin 1896.
[25]  Archives commerciales de la France 17 septembre 1898 -p 1166 BNF-gallica
[26]  Bulletin Municipal Officiel ville de Paris – 6 mai 1920 page 2210
[28]  Certains documents indiquent 28 rue des marchands mais le N°32 est le plus fréquent.
[29]  Recensement de Toulouse Centre de 1911